Régionalisation d’Equip Auto : quand le terrain souffle le chaud et froid

Muriel Blancheton
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Six mini-salons pour six villes entre septembre et octobre 2021. C’est le nouveau format que lancent les organisateurs d’Equip Auto. Une alternative bienvenue pour sa visibilité et celle des équipementiers. Pas forcément pour celle de certains gros distributeurs.

Après la tentative avortée d’une tournée régionale en 2017, soutenue à l’époque par un groupe de presse britannique, Equip Auto réadapte la formule des mini-salons provinciaux. Emmené par Philippe Baudin, son président, le projet annonce six dates à l’automne 2021 et six villes d’ores et déjà retenues*. Planter son drapeau en régions doit maintenir le lien avec le réparateur tout en faisant patienter jusqu’à la prochaine édition parisienne, repoussée à 2022. Un report dû non seulement au Covid mais également, et dans une moindre mesure, par l’intempestif Automechanika. Le gros salon allemand s’est en effet imposé dans la grille 2021, aux mêmes dates que le salon français qui a réagi en se décalant d’une année.

Du coup, l’initiative d’une infusion territoriale a le mérite d’exister et d’être testée grandeur nature. Il faut être présent, visible et audible. L’opération est rondement menée :

  • Les 6 villes sélectionnées accueillent 66% des entreprises de commerce et réparation en France, et plus de 60 % du parc de VL et PL.
  • Chaque événement se déroulera un samedi de 10h00 à 19h00 dans un lieu pouvant accueillir une centaine d’exposants et attirer un millier de visiteurs.
  • Des mini-salons qui auront tout d’un grand : présentation de produits, démonstrations, innovations, mini-conférences en agora sur l’actualité de la filière, pitches d’exposants… et jeux-challenges pour l’animation avec invitation des lauréats sur Equip Auto 2022 du Paris Expo Porte de Versailles.
  • Le concept est à dimension humaine avec des mini-stands standardisés de 2 à 4 m2 fournis clé en main pour des mini-budgets
  • Vu le format, les équipementiers utiliseront certainement le digital en complément, voire feront une visite « à domicile » après la journée, une fois le contact pris.

* Avignon (25 septembre), Nantes (2 octobre), Toulouse (9 octobre), Lille (16 octobre), Lyon (23 octobre), Mulhouse (30 octobre).

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Il est interdit d’interdire…

Mais pendant que les équipementiers doivent saluer une visibilité inespérée dans cette période troublée, on peut d’ores et déjà s’interroger sur l’accueil de la distribution et la position politico-pragmatique des groupements qui fédèrent les distributeurs. Des groupements qui devront bien s’extraire d’entre le marteau du soutien d’un salon professionnel et l’enclume des états d’âmes de leurs adhérents. Car certains en ont ! Parce-qu'ils ne voient pas d’un bon œil l’intrusion d’un Equip Auto, même en version mini, sur leurs zones. L’opération cogne frontalement avec leur propre rassemblement qui assure une bonne partie de leur chiffre annuel. Cela sent le conflit de territoire. Business is Business et la chasse au canard a commencé. Tirs à vue :

« J'y suis farouchement opposé. On ne va pas amener nos clients sur des évènements où se trouvent les concurrents. Nous n’interdirons rien bien sûr, mais nous ne cautionnerons pas », s’agace un distributeur un brin énervé. « Tout ce petit monde – réparateurs et distributeurs concurrents - va se retrouver sur un même stand de 4 m2 ? Mais cela va être un pugilat ! », avance cet autre pro, circonspect. « C’est dommage, nous sommes très attachés au salon national Equip Auto. Cette initiative pourrait compliquer l’avenir avec les organisateurs », menace cet autre témoin. En clair, s’ils exposent, ils s’exposent au risque d’un retour de flamme. « La vision de salons multi distributeurs est angélique. Elle ne fonctionne que pour les équipementiers », ironise ainsi un observateur qui va plus loin : cela ne risque-t-il pas d’être problématique pour les fournisseurs référencés en centrale et donc obligés de facturer via les groupements ?

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Ne pas subir mais agir

Après cette brève mais intense montée en température, le concept resserré de stands identiques pour tout le monde plaît à d’autres acteurs qui jugent cette formule hybride comme une excellente idée. « Tout le monde essaie de se réinventer, donc c’est normal. Nous y sommes favorables, autant pour IDLP qu’Alternative Autoparts ! Il ne faut pas subir la situation, il faut agir », indique Fabrice Godefroy. Pour le directeur général, la régionalisation du salon prouve que des alternatives ou des parades à la situation actuelle sont réalisables. « Et on critique souvent la centralisation trop parisienne du système, des évènements, des entreprises… Donc, ne critiquons pas une initiative visant à infuser les territoires ! Venir à Paris est un investissement coûteux en temps et en ressources. Alors pourquoi ne pas tester cette formule intermédiaire, en format grandeur nature ! Les gros distributeurs peuvent se déplacer facilement, à l’opposé de plus petits qui sont bloqués. Nous le faisons nous-mêmes au niveau régional, de manière personnalisée, et complémentaire à tout évènement plus national. De toute façon, le contexte actuel doit obliger tout le monde à se remettre en question », conclut-il.

Un virus encore virulent ?

Enfin, d’autres questions légitimes remontent du terrain. Pragmatiques d’une part, les garagistes vont-ils se déplacer pour ne pas voir du gros matériel de garage dont ils sont pourtant si friands ? Quelles alternatives à la présentation des produits (digital, in situ chez le réparateur…) ? Et sanitaires d’autre part, car si certains avouent n’avoir aucune vision dogmatique et saluent d’emblée l’initiative de cette décentralisation, la gestion du risque reste un point bloquant. Comment assurer le respect des protocoles sanitaires avec 1000 personnes en circulation sur une journée dans un même endroit ? Et surtout, comment programmer un rassemblement, suggérant un coût en ressources humaines et financières, alors que chacun est suspendu au couperet d’un reconfinement décidé du jour au lendemain selon l’évolution du virus ? Autant de questions surgissant spontanément, et nul doute qu’Equip Auto, qui a déjà pris son bâton de pèlerin pour convaincre ses ouailles, se chargera d’y répondre.

Muriel Blancheton

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